Entretien Impressions

La toile de José Gastardi Impressions Expressions II a inspiré au jeune compositeur Johany Berland un morceau que nous vous invitons à écouter ci-dessous :

Johany Berland

Johany Berland, 30 ans, a d’abord suivi une formation d’ingénieur généraliste, dont il est sorti diplômé, avant de se consacrer pleinement à sa passion pour la musique.

Principalement compositeur de « musique à l’image », il travaille aussi bien sur des publicités TV et des catalogues musicaux pour des émissions de télévision, que pour des courts métrages, des clips, notamment chorégraphiques, et des jeux vidéos.

Multi-instrumentiste (guitare, basse, piano, synthés, batterie), ce synesthète crée une musique « instinctive, narrative par essence et chargée d’images », expressive et émotionnelle, puisant son inspiration dans la littérature, la science, les arts graphiques ou la danse.

Impressions

Impressions a été composé lors du premier mois de confinement en 2020.

« Ce tableau, parmi tous ceux de José, m’a particulièrement marqué. La composition du morceau s’est faite de façon assez spontanée : j’aime bien faire de la musique assez foisonnante, instinctive, voire animale, et cette œuvre m’a tout de suite semblé correspondre à mon univers. C’est la première fois que je faisais de la musique sur une peinture.

Impressions Expressions II, 2018, Acrylique, Collage sur toile 38×55 cm
Avec l’autorisation du peintre José Gastardi


Avant même de penser à des mélodies ou des suites harmoniques, j’essaie de penser en termes de concept. J’ai, disons, trois « méthodes » :
– l’approche thématique, qui part d’une sensation générale ;
– une approche plus visuelle, graphique : il s’agit de représenter les formes, les couleurs par des motifs mélodiques, rythmiques ;
– enfin, représenter le mouvement et la dynamique de l’œuvre et du peintre.

Ici, je n’ai pas choisi et j’ai essayé de faire les trois ! Avec des points d’orgue. Ce tableau s’y prêtait bien, d’où la longueur du morceau.

Outre le piano, la guitare, la basse, la batterie, je travaille à l’ordinateur, notamment pour la formation symphonique avec toutes les cordes et une grande partie des bois : clarinette, basson, hautbois… Afin de donner un côté plus « animal » au morceau, je n’ai utilisé aucun cuivre. J’ai composé la musique en partant d’une disposition verticale du tableau, avec cette espèce de croix.

Le morceau n’est pas basé sur des mouvements, il est de style néo-classique, mais pas de « structure classique ».

Durant 50 premières secondes : je questionne l’œuvre, son rouge très texturé, granuleux, son côté énigmatique. J’utilise des hautbois « dansants », des cordes (violons) et des harmoniques pour texturiser le son dans le même esprit.

De 0:50 à 2:20 : je suis l’approche graphique de la représentation des formes, du bas vers le haut. Les bois « tournoyants », aux sonorités naturelles, évoquent une élévation. Jusqu’ici, j’adopte plutôt le point de vue du spectateur.

Ensuite, jusqu’à 3:13, je me mets du côté du peintre. Je délaisse l’émotion du début pour un son plus brut, plus dynamique. Le mouvement musical épouse le geste du peintre et le mouvement donné par les formes géométriques. Harmoniquement, c’est moins clair, pour finir sur des notes répétitives, saccadées, des mélodies circulaires, comme des gestes de peintre.

À partir de 3’13, c’est le bouquet final où se mêlent visions du peintre et du spectateur. C’est mon approche « thématique » qui englobe le thème général de la toile, avec émotion. Je prends du recul sur l’œuvre, je la redécouvre après l’avoir analysée. Tout le tableau est représenté en simultané. L’outro (4’32) serait en quelque sorte le peintre qui prend du recul et qui regarde son tableau, l’énergie passée ayant laissé place à la sérénité.

Ce morceau de confinement m’a donné envie de travailler à partir d’autres œuvres peintes. Il faudrait que le tableau me parle au niveau de l’intention, plus que le style. Peut-être aussi ai-j’ai donné plus d’énergie au morceau du fait qu’on était confinés et que tout était plus intense ? »

Entretien avec Céline Allais, décembre 2020

Visiter le site internet du peintre José Gastardi ici